accueil BIODANZA > textes > Edgar Morin le 16 juillet 2011
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12-15 juillet 2011

1er Congrès Européen d'Éducation Biocentrique
15-17 juillet 2011
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conférence d'Edgar MORIN
16 juillet 2011
Edgar Morin, sociologue et penseur du monde actuel, est directeur de recherches émérite au CNRS et docteur honoris causa de 14 universités de part le monde.
Qu’est-ce que la connaissance ? Qu’est-ce qu’être humain ?

Il faut réformer profondément nos systèmes d’éducation à tous points de vue. Ici je parlerai d’un seul point de vue qui concerne les matières que l’on enseigne et je vais partir d’une formule qu’a exprimée le fondateur de la Biodanza ; cette formule se trouve aussi dans le livre pédagogique de J.J. Rousseau, l'Émile.
Que dit l’éducateur en parlant de son élève ? Il dit : je veux lui enseigner à vivre. Vivre.
Bien entendu on ne peut enseigner qu’à aider à vivre, on ne peut pas inculquer   la vie mais on peut aider chacun à vivre, c’est à dire à affronter les problèmes, à traiter les problèmes de sa vie. Or ces problèmes ne sont pas seulement professionnels, ils sont ceux de la vie quotidienne de chacun. Bien entendu la grammaire, les mathématiques, ça aide à vivre en société mais on se rend compte que les problèmes les plus importants, les plus fondamentaux de la vie ne sont pas enseignés. Pourquoi ?
Parce que notre enseignement, fondé sur la séparation des disciplines  coupe en petits morceaux ces problèmes fondamentaux ; par exemple on n’enseigne pas la compréhension humaine, on n’enseigne pas à affronter les incertitudes alors que chacun va rencontrer dans sa vie beaucoup d’incertitudes, on n’enseigne pas les pièges et les difficultés de la connaissance ; on n’enseigne pas ce que c’est d’être humain ; on n’enseigne pas ce qu’est l’époque où nous vivons que j’appelle l’ère planétaire et qui s’appelle la mondialisation.
Pourquoi n’enseigne t-on pas tout cela ?
Parce que pour comprendre ces problèmes, il faut prendre des éléments de connaissance dans des disciplines qui sont séparées les unes des autres.

L’idée de la connaissance
En général on enseigne les problèmes de la connaissance en philosophie et encore même pas, c’est plutôt dans ce qu’on appelle l’épistémologie, la réflexion sur la connaissance. Or, c’est un problème qu’on devrait enseigner dès les petites classes et tout au cours d’une vie d’élève et d’étudiant. Pourquoi ?
Parce que quand nous réfléchissons sur les connaissances du passé, nous nous rendons compte que les certitudes pour ces personnes du passé sont pour nous des erreurs et des illusions. Quand nous regardons les religions du passé, nous pensons que ce sont des religions trompeuses. Quand nous regardons même la science, nous constatons qu’ont survécu à cette science deux grandes théories : la thermodynamique et la théorie de l’évolution. Quand nous regardons les croyances politiques, ceux qui ont cru au nazisme, au fascisme, au communisme stalinien, ceux qui ont cru au maoïsme, on pense aujourd’hui que ce sont des illusions et des erreurs.
Et quand on pense qu’après on a proposé le néo-libéralisme comme la solution de tous les problèmes humains, nous nous rendons compte de plus en plus que c’était non pas une vérité scientifique mais une illusion. Et vous savez ce qu’a dit Descartes : » le propre de l’erreur, c’est qu’elle ne se connaît pas comme telle ; quand on est dans l’erreur, on ne sait pas qu’on y est ». Or c’est une erreur de sous-estimer l’importance de l’erreur. Nous risquons sans cesse de nous tromper et les conséquences peuvent être vitales si on se trompe dans le choix de la personne avec qui on va vivre, ou si on se trompe dans le choix d’une carrière ; si un général se trompe dans sa stratégie, les conséquences sont extrêmement graves pour les personnes.
Alors pourquoi y a t-il un risque d’erreur dans la connaissance ?
Toute connaissance est une traduction et une reconstruction. Par exemple la connaissance visuelle : la perception de mes yeux n’est pas une photographie que mes yeux ont pris de vous. Dans l’image rétinienne que j’ai, les personnes du dernier rang sont petites, beaucoup plus petites que les personnes du premier rang mais de cela je n’ai pas conscience parce qu’il existe un mécanisme qu’on appelle la constance perceptive qui fait que je perçois non pas des géants et des nains mais tout le monde avec une taille normale.

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